Si, entre la Première et la Deuxième Symphonie, Beethoven franchit un grand pas, entre la Deuxième et la Troisième, il fait un bond. Elle est, à l’exception de la Neuvième, son oeuvre symphonique la plus longue, et c’est aussi la première à laquelle fut accordée une signification transcendant la musique proprement dite, la première composée aussi dans le style dit « héroïque ». Le ton de cette symphonie reflète l’esprit de l’époque : ses accents sont, dès les premiers accords grondants, révolutionnaires et marquent un adieu définitif au XVIIIe siècle. La dédicace à Napoléon, effacée dans un geste de colère patriotique après qu'il se couronna lui-même empereur, n’est qu’un indice parmi d’autres de l’intention et du message véhiculés par cette oeuvre emphatique, un autre est l’utilisation de la musique de la Révolution française qu’il importait naturellement d’associer à l’ambition symphonique la plus haute. Une architecture monumentale, conjuguée à une différenciation extrême de tous les éléments, caractérise l’« Eroica », oeuvre hors du commun qui, à juste titre, troubla, voire bouleversa les contemporains du compositeur. Le premier mouvement, de proportions jusqu’alors inouïes, traite de manière sans cesse renouvelée un matériau musical à vrai dire très simple – un accord parfait –, le combine à une foule de motifs complémentaires et le fait progresser en plusieurs vagues de grandioses crescendi successifs. À la Marche funèbre qui déroule une saisissante grandeur épique et au Scherzo d’une densité rythmique débridée succède, avec le Finale, un mouvement à variations très inhabituel en ce qu’il traite deux thèmes – la mélodie et la voix correspondante à la basse –, repris tous deux de la musique d’un ballet antérieur, Les Créatures de Prométhée : référence copieusement commentée au demi-dieu de l’Antiquité, ami des hommes et messager d’une culture, dont l’importance devrait être au moins égale à la dédicace – même supprimée – à Napoléon.
Si, entre la Première et la Deuxième Symphonie, Beethoven franchit un grand pas, entre la Deuxième et la Troisième, il fait un bond. Elle est, à l’exception de la Neuvième, son oeuvre symphonique la plus longue, et c’est aussi la première à laquelle fut accordée une signification transcendant la musique proprement dite, la première composée aussi dans le style dit « héroïque ». Le ton de cette symphonie reflète l’esprit de l’époque : ses accents sont, dès les premiers accords grondants, révolutionnaires et marquent un adieu définitif au XVIIIe siècle. La dédicace à Napoléon, effacée dans un geste de colère patriotique après qu'il se couronna lui-même empereur, n’est qu’un indice parmi d’autres de l’intention et du message véhiculés par cette oeuvre emphatique, un autre est l’utilisation de la musique de la Révolution française qu’il importait naturellement d’associer à l’ambition symphonique la plus haute. Une architecture monumentale, conjuguée à une différenciation extrême de tous les éléments, caractérise l’« Eroica », oeuvre hors du commun qui, à juste titre, troubla, voire bouleversa les contemporains du compositeur. Le premier mouvement, de proportions jusqu’alors inouïes, traite de manière sans cesse renouvelée un matériau musical à vrai dire très simple – un accord parfait –, le combine à une foule de motifs complémentaires et le fait progresser en plusieurs vagues de grandioses crescendi successifs. À la Marche funèbre qui déroule une saisissante grandeur épique et au Scherzo d’une densité rythmique débridée succède, avec le Finale, un mouvement à variations très inhabituel en ce qu’il traite deux thèmes – la mélodie et la voix correspondante à la basse –, repris tous deux de la musique d’un ballet antérieur, Les Créatures de Prométhée : référence copieusement commentée au demi-dieu de l’Antiquité, ami des hommes et messager d’une culture, dont l’importance devrait être au moins égale à la dédicace – même supprimée – à Napoléon.